Évocation sacerdotale

16 mai 2019 Non Par Don Guillaume Chevallier

D’après les affiches des services des vocations, c’est en se reconnaissant dans le visage d’un prêtre beau, jeune, dynamique, vaguement barbu, à l’aise avec les réseaux sociaux, dans une chasuble «tradi», qu’un jeune trouverait l’inspiration ou le courage d’une vocation sacerdotale.Le monde de la publicité est loin de la réalité.C’est plutôt, en vérité, le Christ pauvre qu’il faudrait représenter en grand. C’est le silence de l’adoration qu’il faudrait faire entendre. Ce sont des personnes un peu désorientées par la vie et des pauvres qu’il faudrait afficher. Il faudrait peindre ce qu’est une civilisation qui ignore l’Amour absolu, sa présence, son appel continu, son cri à la justice et à la vie… Car ce sont ces choses-là qui font qu’un jeune se décide à devenir prêtre. Indigné que tant de beauté et tant d’amour, qui débordent du cœur du Christ, tombent dans un monde si indifférent et si froid.Non, la vocation sacerdotale n’est pas une sorte de fatalité irrésistible et mystérieuse. Elle n’est pas non plus une fuite de ce que les gens estiment être les «vraies» responsabilités –qui sont des responsabilités mon-daines. Le jour où, en 1607, Bérulle refusa à Henri IV d’être le précepteur du dauphin –de devenir un homme de cour, un prêtre mondain –il s’ouvrit tout d’un coup à la véritable mission qu’il devait poursuivre comme prêtre: être pour tous «l’apôtre du Verbe incarné». Et son action posa alors les bases d’un solide redressement moral et théologal des prêtres, de l’Eglise, de la France et plus loin encore. Il fit se lever des saints. Il y a des renoncements qui propulsent dans la logique divine du Royaume. Il y a des responsabilités divines et des solidarités différentes que l’on choisit.La vocation sacerdotale est une libre ambition de répondre aux paroles et aux bénédictions de Jésus. De lui appartenir, de le représenter, de le perpétuer jusqu’à sa venue en gloire. De faire pencher avec lui la balance vers le bien. D’appeler, une par une, les personnes à bas-culer du côté du monde de la résurrection, de la pénitence et de la réparation des péchés, de la miséricorde, du service des plus petits, de la sagesse puisée en Dieu et appliquée à tous les domaines de la vie. La vocation sacerdotale, c’est consacrer sa vie à la Vérité divine qui dénoue les liens cachés des âmes, qui donne la vie en abondance et la vie éternelle, qui relève les personnes, qui les unit en Dieu. C’est jouer consciemment chaque jour, avec la force et la simplicité de l’évangile, sur le terrain de l’éternité. Le choc avec la Parole de Dieu dans la Bible. L’éblouissement devant le puissant mystère de la liturgie. L’irradiation bienfaisante de la présence du Christ dans ses sacrements. Le scandale de la pauvreté qu’on cache un peu et celui de la misère spirituelle que notre société déguise si mal. La prise de conscience qu’il y a dans ce monde, par volonté divine, des instruments totalement pauvres du don inconditionnel du Créateur à la création indigente. Qu’on peut se tenir au pied de la croix dans la messe pour dispenser ce sang qui a coulé dans la paix. La clarté du signe du célibat, qui annonce un autre monde et une autre manière de vivre dans ce monde. La beauté d’une communauté chrétienne qui vit la foi en pensées et en actes. Voilà ce qui permettra à des jeunes de vouloir, d’accepter, de servir l’évangélisation en France et dans le monde.C’est le tranchant de l’évangile qui attire.